Seule Ségolène Royal est venue soutenir les Fabris dans leur usine

Publié le par Désirs d'Avenir en Vaucluse

Après les Conti, les Fabris. Le flambeau de la révolte sociale sur fond d'intimidation, de détresse bien réelle et d'une pincée d'esbroufe, a changé de lieu. Les caméras, les micros et les flashes aussi. Un peu plus d'un mois après l'épilogue du terrible et médiatique bras de fer entre les 1.120 salariés de l'usine de pneumatiques Continental à Clairoix dans l'Oise et le groupe allemand, Châtellerault, dans la Vienne, est devenue en quelques heures la capitale de la contestation sociale. Il a suffi d'un creux dans l'actualité de ce début d'été indolent, d'une brève de l'AFP dimanche dernier pour que tout s'emballe.

La colère des salariés de New Fabris, un sous-traitant automobile de Châtellerault liquidé le 16 juin, comme le déferlement médiatique. Et les uns comme les autres ont mis un peu d'huile sur le feu qui couvait. Résultat: le combat des Fabris, relégué depuis un mois aux actualités et aux quotidiens régionaux, est passé en tête de gondole. En France mais aussi en Europe.

Il a suffi d'un mot : «péter»

La une de Libération mais aussi TF1, des télés allemandes, des journaux et des radios anglais, luxembourgeois même, ont saisi au bond la colère de ces ouvriers qui jouaient hier encore à la belote et aux boules dans la cour de leur usine. Certes, ils avaient bien frappé à la porte des élus et personnalités locales, s'étaient invités au conseil régional, au siège de PSA, l'un des principaux clients de leur usine, mais jusque-là rien. Des coups d'épée dans l'eau. Seule Ségolène Royal est venue soutenir les Fabris dans leur usine.

En fait il a suffi d'un mot: «péter». «On va faire péter l'usine», a relayé l'AFP dans la bouche d'un des délégués syndicaux pour que la mayonnaise prenne. «Enfin», soupirent plusieurs salariés qui se demandaient bien «ce qu'il fallait faire pour qu'on parle d'[eux] Depuis il a fallu s'habituer aux journalistes, alimenter régulièrement le feu qui a déjà détruit plusieurs machines obsolètes au début du blocus.

Si l'emballage a changé, le fond de la révolte des Fabris n'a pas varié (lire ci-dessous). Depuis le 16 juin et la liquidation, ils réclament 30.000 euros d'indemnité par employé - 11 millions d'euros au total - à leurs principaux clients, PSA et Renault, qu'ils désignent comme les responsables de la mort de Fabris. Aujourd'hui, ces hommes et ces femmes qui ne veulent pas «crever en silence» ajoutent haut et surtout très fort: «Sinon, on fera péter l'usine»... pour détruire les millions d'euros de machines dont certaines toutes récentes et de pièces qu'elle contient encore. L'ultimatum est fixé au 31 juillet.

Pour montrer leur détermination, ils ont disposé des dizaines de bouteilles de gaz à plusieurs endroits bien en vue. Des bouteilles censées être reliées à un détonateur par un fil qui ne mène nulle part. Selon les versions, les bouteilles de gaz sont là depuis deux semaines à un mois. Impossible de savoir. «Nous sommes déterminés mais ouverts à la discussion», explique Eric Poisson, délégué CFDT qui ne comprend pas que le ministre de l'Industrie Christian Estrosi refuse de les recevoir tant qu'il y aura une menace: «Il nous avait accordé un rendez-vous pour le 20 juillet alors que les bouteilles étaient là. Ce n'est que parce que les médias ont réagi qu'il dit ne plus vouloir nous recevoir.»

«Un trésor de guerre»

Guerre des mots, guerre de communication. «Nous, c'est Renault et PSA qu'on menace, ceux qui ont provoqué notre perte. S'ils veulent récupérer les machines et les pièces, ils doivent payer les 11 millions d'euros qu'on réclame. Ils ont accordé à d'autres sous-traitants comme Rencast à Thonon-les-Bains, pourquoi pas nous», interroge le délégué CFDT, qui devait se rendre aujourd'hui avec ses collègues au siège de Renault à Boulogne-Billancourt pour faire pression sur le constructeur.

Après une visite des 27.000 mètres carrés d'une usine fantôme remplie de machines muettes et de pièces empilées, il ajoute: «C'est notre trésor de guerre.» Parce que pour les Fabris, c'est bien une «guerre», une guerre qui a broyé une entreprise familiale en moins de dix ans (lire encadré), une guerre qui les met sur le carreau. Une «guerre» dont ils veulent gagner la dernière bataille.


Source: Charente libre / Photo:
Chamussy (Sipa)
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